Se souvenir du “Procès du singe” | Le Monde de Demain

Se souvenir du “Procès du singe”

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À l’occasion de son 100e anniversaire, cette controverse pose toujours de profondes questions à propos de la création, de l’évolution et de l’éducation.

La question de l’éducation des enfants et de définir ce qu’ils doivent apprendre à l’école est depuis longtemps un sujet de controverse. Aujourd’hui, le débat fait rage pour redonner plus d’autorité aux échelons régionaux, provinciaux ou cantonaux, tout en limitant l’implication du gouvernement national dans l’éducation. Un incident vieux d’un siècle peut nous aider à mieux appréhender les controverses actuelles.

Le contexte du “procès du singe”

Tout commença lorsque le Butler Act, une loi promulguée en mars 1925 dans le Tennessee, interdit aux écoles de l’État d’enseigner la théorie de l’évolution. Cette loi interdisait à toute école financée par des fonds publics « d’enseigner une théorie qui nie l’histoire de la Création divine de l’homme, telle qu’elle est enseignée dans la Bible, et d’enseigner à la place que l’homme descend d’un ordre inférieur d’animaux ».1 Elle prévoyait une amende allant de 100 à 500$ pour toute personne qui y contreviendrait.

Toutefois, les professeurs de biologie du Tennessee furent confrontés à un dilemme, car l’État avait auparavant imposé l’utilisation d’un manuel de biologie (Biologie civique de George William Hunter) qui enseignait ouvertement l’évolution !

Ce manuel faisait l’éloge de « la merveilleuse découverte de la doctrine de l’évolution » par Charles Darwin et proclamait que Darwin « donna au monde les preuves de la théorie sur laquelle nous basons aujourd’hui le progrès du monde ».2 Les professeurs de biologie furent donc contraints de choisir entre suivre le programme de l’État et utiliser un livre pro-évolution, en violation du Butler Act, ou obéir à cette nouvelle loi mais en enfreignant les directives du programme de l’État. Il convient de noter que le manuel de Hunter serait révoqué de nos jours car il est à la fois obsolète et offensant, créant différents groupes raciaux au sein de l’évolution, dont « le type le plus élevé de tous, les Caucasiens ».3 De nos jours, les chrétiens qui croient en la Bible s’accordent à dire que les êtres humains sont tous membres d’une seule et même espèce aux multiples facettes ; les races étant à la fois unies par des caractéristiques communes et différentes par des qualités distinctes. Elles présentent des différences mais aucune n’est supérieure ou inférieure à une autre.

Alors que les directives contradictoires du Tennessee ouvraient la voie à une action en justice, l’Union américaine des libertés civiles (ACLU) proposa d’apporter son soutien à toute personne désireuse de contester le Butler Act et, très vite, les dirigeants de la petite ville maussade de Dayton, dans le Tennessee, se dirent que la publicité nationale d’une telle affaire pourrait contribuer à revitaliser leur ville. La population de Dayton avait chuté à 1800 habitants, alors qu’elle en comptait 3000 à la fin du 19e siècle.

Un jeune ingénieur de Dayton, George Rappleyea, demanda à l’une de ses connaissances, le sympathique John Scopes, professeur de biologie de 24 ans à l’école secondaire du comté de Rhea, s’il accepterait d’être la victime de bonne volonté dans un procès-test. Avec l’aide du procureur Herbert Hicks, également ami de Scopes, ce dernier fut accusé d’avoir enfreint le Butler Act. Leur plan était de le faire condamner afin que les appels de la décision puissent aller jusqu’à la Cour suprême des États-Unis, modifiant ainsi la loi du Tennessee tout en soutenant l’économie de Dayton.

Le développement du procès

Entre l’arrestation de Scopes le 9 mai 1925 et le début de son procès le 10 juillet, Dayton devint le centre de l’attention. Bien que les poursuites contre Scopes aient été lancées pour tester des législations contradictoires et motivées par le désir de braquer les projecteurs nationaux sur la ville, l’opinion publique était très favorable au Butler Act et la plupart des gens déclaraient croire au récit biblique de la création.

La présence de William Jennings Bryan en tant qu’avocat principal de l’accusation ne fit qu’accroître la notoriété du procès. Bien qu’il n’ait plus pratiqué activement le droit depuis des décennies, Bryan était une figure nationale, ayant été trois fois candidat à la présidence des États-Unis. Il était devenu un éminent conférencier protestant et l’un des premiers à diffuser son message à la radio, ce qui attira probablement l’attention de l’équipe chargée de l’accusation dans le procès de Scopes. Le 25 mai, Bryan déclara au Chattanooga News : « Les journaux qui ont traité la loi du Tennessee de plaisanterie trouveront que ce n’en est pas une. Certaines législatures et certains tribunaux ont exclu la Bible des écoles. Si une assemblée législative peut interdire la lecture de la Bible, ne peut-elle pas interdire l’usage d’un livre qualifiant la Bible de mensonge ? » Bryan estimait que « le véritable enjeu du procès Scopes n’est pas l’enseignement de l’évolution, mais la question de savoir qui doit contrôler nos écoles et déterminer ce qui doit y être enseigné ».

Clarence Darrow, avocat de renom, membre éminent de l’ACLU et agnostique, accepta de défendre Scopes. Très tôt, l’auteur de science-fiction H.G. Wells fut invité à défendre Scopes, mais il déclina la proposition. D’autres cherchèrent à faire venir l’inventeur Thomas Edison à Dayton pour témoigner en faveur de l’évolution. Comme le rapportait le Chattanooga Daily Times le 11 juillet, « la défense de Scopes, qui représente le modernisme et la science, espère que la salle d’audience du juge Raulston deviendra la plus grande salle de classe du monde ». Certains craignaient que le procès ne devienne un cirque lorsqu’on apprit que Lillian Aurora, une artiste de théâtre populaire connue pour ses numéros avec des animaux, proposa à la défense de prêter le singe ayant tourné dans le film « Le chimpanzé éduqué », s’ils pensaient que cela pourrait les aider dans leur plaidoirie.

Pendant les jours qui précédèrent le début du procès à Dayton, Scopes se joignit à l’un de ses avocats, John Neal, pour effectuer une tournée à Washington et dans d’autres villes de l’Est des États-Unis afin d’attirer l’attention nationale sur leur cause. Au cours de ce voyage, Scopes se rendit à la Bibliothèque du Congrès et posa pendant 15 minutes, pour les journalistes et les photographes, devant la copie originale de la Constitution des États-Unis. Au cours de leur voyage, Scopes et Neal visitèrent les chambres de la Cour suprême, faisant remarquer que c’est là où le procès pourrait finalement être résolu.

Malgré le risque de ridicule généralisé, les hommes d’affaires et les dirigeants municipaux de Dayton accueillirent favorablement le procès, espérant qu’il donnerait un coup de fouet économique à la petite ville en difficulté. Cependant, l’attention que Scopes et Neal apportèrent à cette petite ville ne fut pas entièrement positive. Ainsi, le Chattanooga Daily Times du 18 juillet cita la déclaration du dramaturge et romancier allemand Herman Sudermann : « Le procès expose l’Amérique au ridicule du monde entier. » William Scott, professeur de géologie à l’université de Princeton, qualifia le procès de « spectacle des plus humiliants dont le monde entier se moque ».

Le procès fut un non-événement

Après une telle publicité, il n’est pas surprenant que le procès n’ait pas répondu aux attentes de nombreux observateurs. Alors que Bryan espérait utiliser le procès pour attaquer la théorie de l’évolution et que de nombreux partisans de Scopes y voyaient une tribune pour promouvoir la science moderne, le juge John Raulston anéantit les espoirs des deux parties en excluant du procès les témoignages des experts évolutionnistes et créationnistes. Ces témoignages furent ajoutés au dossier judiciaire à l’intention des journalistes, mais ils ne jouèrent aucun rôle dans le déroulement du procès.

La bataille entre l’évolution et la création ayant été mise à l’écart, les observateurs déplorèrent que le procès soit devenu « une simple formalité », les deux parties reconnaissant que Scopes, en enseignant à partir du manuel approuvé par l’État, avait enfreint le Butler Act. Une fois le cirque médiatique terminé, l’affaire était basique. Le jury ne mit que neuf minutes pour déclarer Scopes coupable, se réunissant le matin du 21 juillet à 11h20 et rendant son verdict à 11h29 après cinq minutes de délibération. Le juge Raulston imposa une amende de 100$, en attendant que l’affaire soit portée en appel devant la Cour suprême du Tennessee. Ce jour-là, le Chattanooga News qualifia cette affaire de « délit mineur le plus célèbre du monde » qui « commença par un procès, se transforma en un cirque, puis en un échange de propos orduriers entre avocats ».

Bien que les plaignants fussent prêts à porter l’affaire devant la Cour suprême des États-Unis, cela ne s’est jamais produit. En janvier 1927, la Cour suprême du Tennessee annula la condamnation de John Thomas Scopes pour vice de forme. Selon la loi du Tennessee de l’époque, seul un jury pouvait imposer une amende supérieure à 50$, si bien que l’amende de 100$ imposée par le juge seul était irrecevable. Il ne restait plus aucun problème juridique à porter devant les tribunaux fédéraux.

Les conséquences

Le Butler Act resta en vigueur jusqu’en mai 1967, lorsque le gouvernement du Tennessee l’abrogea afin d’éviter une nouvelle contestation judiciaire similaire, dont beaucoup craignaient qu’elle ne devienne un spectacle international embarrassant.

Quant aux avantages économiques du procès pour la ville de Dayton, le Chattanooga Daily Times publiait le 11 juillet un article intitulé « Les foules immenses attendues depuis des semaines ne se manifestent pas ». L’article rapportait : « Bien sûr, quelques centaines de personnes sont présentes et elles sont profondément intéressées, mais pour la plupart, leur intérêt est d’essayer d’obtenir les nouvelles en primeur, car ce sont des journalistes de presse. » Il ne s’agissait pas de la foule de touristes espérée par les commerçants de la ville. La plupart des gens étaient entassés dans le palais de justice du comté de Rhea, ne profitant pas de ce que la ville avait à offrir. On estime que l’économie du comté de Rhea fut bien plus stimulée par l’éclipse solaire de 2017, alors que Dayton se trouvait dans la trajectoire de l’obscurité totale, que par le procès de Scopes ! Cependant, il est exact que le Procès du singe laissa un impact bien plus qu’économique.

Un siècle plus tard, les tenants et les aboutissants du Procès du singe se sont largement effacés de la mémoire publique. De nos jours, la plupart des évolutionnistes ont largement abandonné la théorie originale de Darwin en faveur d’alternatives modernisées. Pourtant, la question du design intelligent contre l’évolution reste un sujet controversé. Les biologistes évolutionnistes envisagent désormais des théories que la plupart d’entre eux jugeaient ridicules il y a seulement une ou deux générations, comme la panspermie – l’idée selon laquelle les formes de vie primitives ont dû venir de l’espace, car n’y a pas eu assez de temps pour que la vie intelligente évolue sur notre planète.

Nous pourrions aussi réfléchir à cette déclaration perspicace, tirée du manuel Biologique civique utilisé dans les classes de biologie du Tennessee, en 1925 : « Bien qu’anatomiquement il y ait une plus grande différence entre le type de singe le plus bas et le plus haut qu’entre le type de singe le plus haut et le sauvage le plus bas, il existe un immense fossé mental entre le singe et l’homme. »4 Sachant que l’ADN des chimpanzés et des êtres humains est assez semblable, variant selon certaines estimations de seulement 2%, les évolutionnistes n’arrivent pas à expliquer que les capacités mentales des êtres humains soient largement supérieures. Tandis que les évolutionnistes sont déconcertés, ceux qui étudient la parole de Dieu comprennent que Celui-ci a placé « l’esprit de l’homme » dans les êtres humains (Job 32 :8), les rendant capables, contrairement aux animaux, de recevoir le Saint-Esprit après le baptême et l’imposition des mains (voir notre “Question et réponse” à la page 31 de ce numéro).

Ceux qui étudient sérieusement la parole de Dieu doivent se poser des questions : La théorie de l’évolution humaine est-elle compatible avec les Écritures ? Ou bien s’agit-il d’une tentative de nier les vérités évidentes du monde qui nous entoure ? Pour en apprendre davantage, lisez notre brochure gratuite Évolution ou création : la dimension manquante

  1. Le Procès du singe : la Bible contre Darwin, Gordon Golding, éditions Complexe, p. 35
  2. Civic Biology, George William Hunter, p. 405
  3. Ibid., p. 196
  4. Ibid., p. 195

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